
Jeanne Siaud-Facchin, « Désobéir, c’est s’octroyer la possibilité de prendre des chemins de traverse »
Posté le 11 juin 2017
Psychologue clinicienne et psychothérapeute, Jeanne Siaud-Facchin est spécialiste des troubles des apprentissages et des surdoués. En 2014, elle avait souligné sur la scène de TEDxVaugirardRoad l’importance « d’avoir une boite à soleil au fond de soi » pour nourrir son bonheur. 3 ans après, elle relit avec nous son expérience.
Avec le recul, comment c’était de passer sur la scène de TEDxVR ?
Il m’arrive souvent de monter sur scène, de parler en public ou même de passer à la télé devant des millions de gens, comme avec Frédéric Lopez pour Leurs secrets du bonheur. Mais l’expérience de TEDxVR – son format, ses contraintes – j’ai trouvé ça terrifiant ! Pour trois raisons principales, je pense, même si on ne comprend pas grand-chose à ce qui anime l’âme humaine.
D’abord, on est supervisé, régulé, pendant la préparation, qui transforme notre façon spontanée de dire les choses. On doit s’approprier un nouveau discours – à la fois le nôtre et pas le nôtre – à la virgule près. Ensuite, et c’est lié à ce que je viens de dire, ça n’a pas été évident pour moi d’apprendre par cœur. Je suis plus à l’aise avec une trame, à partir de laquelle j’improvise. Les mots me viennent plutôt facilement, c’est un exercice familier pour moi. Enfin, j’avais l’impression d’être une comédienne qui récitait un texte et je n’étais pas vraiment à l’aise avec ça.
C’était une expérience à la fois éprouvante et enrichissante. Moi qui ai l’habitude de travailler seule le plus souvent, j’ai beaucoup aimé être coachée par Stéphane Roger, dont les remarques étaient toujours pertinentes et bienveillantes. J’étais fière et honorée de faire cet exercice particulier. C’était une opportunité de me confronter à ce défi, de savoir si j’étais capable de le faire ou pas. Ça m’a permis d’explorer de nouvelles facettes de moi-même.
Qu’avez-vous fait depuis dans la lignée de ce talk ?
C’est ce talk qui était dans la lignée de ce que je fais dans la vie ! Stéphane avait choisi l’angle après avoir lu mon livre « Comment la méditation a changé ma vie et pourrait bien changer la vôtre ». Mon passage sur scène – même s’il n’évoquait pas les surdoués, avec lesquels je travaille beaucoup – reflétait mon orientation de clinicienne : le choix d’une psychologie au présent, où l’on sort de l’archéologie de la souffrance, pour trouver comment alimenter ses ressources, se relier à ce qui nous fait du bien.
Il était dans la droite ligne de mon projet professionnel quotidien, la mission de vie que j’ai acceptée : apporter à chacun les clés nécessaires pour vivre la même vie, mais en mieux.
Pour aider les petits et les grands, j’utilise d’autres outils concrets que la boite à soleil, que j’évoquais dans le talk : le bocal à billes – pour favoriser l’expression en famille ; la machine à capturer le bonheur – un compteur de bons moments ; ou encore des réglettes de l’humeur. Mais le plus important pour les personnes que j’accompagne, ce sont les exercices à faire au quotidien, qui permettent notamment de relier davantage la tête et le corps. C’est comme ça que je suis arrivée à la méditation de pleine conscience, qui fait depuis partie intégrante de ma pratique professionnelle et plus globalement de ma vie.
Qu’est-ce qui vous rend heureuse ?
L’engagement, la transmission. Ce sont les autres qui m’intéressent. A partir du moment où ça a du sens pour les autres, ça en a pour moi !
Quelle citation inspirante aimeriez-vous partager ?
« La sagesse, c’est d’avoir des rêves assez grands pour ne pas les perdre de vue », d’Oscar Wilde. C’est tellement important de cultiver la capacité à s’émerveiller dans la vie, de sentir qu’on est vivant et présent. D’écarquiller les yeux en permanence, et de mettre de la lumière dans nos vies.
Et un TED/TEDx talk qui vous a particulièrement marqué ? En quoi ?
Le pouvoir de la vulnérabilité, de Bene Brown. C’est essentiel d’accepter notre fragilité, qui n’est ni un handicap, ni une faiblesse. C’est ça qui nous relie les uns aux autres. Le reste, ça n’est que du bluff et de la construction. On fait semblant de ne pas avoir peur, on développe des stratégies, on tricote autour de nos craintes. Reconnaître notre vulnérabilité, accepter d’être soi-même, avoir des liens authentiques, c’est une grande force pour nos vies.
Que vous inspire le thème de l’édition 2017, DésobéissanceS ?
Les chemins de traverse ! Chacun devrait pouvoir s’octroyer la possibilité de sortir des autoroutes pour explorer d’autres voies. De faire un pas de côté, de voir les choses autrement pour élargir sa créativité. Vous me demandez quelles sont mes désobéissances ? Je ne suis pas sûre d’avoir un jour obéi !
Qu’avez-vous à nous dire que nous ne vous avons pas demandé ?
Merci !
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Biographie – Jeanne Siaud-Facchin
Psychologue clinicienne et psychothérapeute. Ancienne Attachée des hôpitaux de Paris et de Marseille, elle est spécialiste des troubles des apprentissages scolaires (www.cogitoz.com) et des surdoués (www.zebrasurdoue.com).Depuis plusieurs années, elle s’engage personnellement et professionnellement dans la Méditation de Pleine Conscience, Mindfulness (www.meditez.com). Auteur de nombreux ouvrages et articles scientifiques (« Trop intelligent pour être heureux ? L’adulte surdoué́ » – Odile Jacob 2008), enseignante à l’université́, elle a une approche de la psychologie résolument intégrative et positive.
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Propos recueillis par Flora Clodic-Tanguy
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